Cette réforme s’annonce destructrice entre foisonnement de labels et « contrats clé en main » pour les rectorats et chefs d’établissement.

Des exceptions, moins de règles La « nouvelle éducation prioritaire » telle que la présente le ministère sera le parent pauvre de la précédente. Les expérimentations engagent une poignée de collèges qui ne relevaient pas de l’éducation prioritaire et quelques lycées général et technologiques, et professionnels déclassés depuis 2014, qui ont accepté de signer un contrat local d’accompagnement triennal (CLA). Les moyens octroyés prennent la forme d’heures supplémentaires et d’IMP (indemnité pour mission particulière) en contrepartie de projets construits et mis en avant par des équipes volontaires.

Plutôt que de développer les collectifs de travail, cela renforce la concurrence entre les personnels comme entre les établissements. Les critères pour obtenir un CLA ne sont pas transparents et la pérennité de ces moyens n’est pas assurée. La délabellisation des REP, prévue en septembre 2022, entraînera la disparition de l’indemnité et les bonifications afférentes. La logique des CLA préfigure les nouvelles orientations du ministère. L’allocation progressive de moyens pourrait bien être d’abord soumise à la signature d’un CLA.

Alors que les indemnités REP ou REP+ concernent actuellement tous les professeurs et CPE des réseaux d’éducation prioritaire, les professeurs en CLA ne bénéficient pas tous d’une indemnité. Le SNES-FSU revendique bien au contraire l’élargissement de l’indemnité REP aux AESH et AED et l’extension de la pondération REP+ à tous les personnels de l’éducation prioritaire du fait des conditions d’exercice plus difficiles et du travail en équipe quotidien informel, plus nécessaire qu’ailleurs.

Le privé met un pied dans la porte
Si cela ne suffisait pas, le CLA ouvre la porte de l’éducation prioritaire à l’enseignement privé sous contrat ! Six établissements (à Marseille, au Mans, à Nantes et à Roubaix) sont retenus sans qu’ils en aient les critères sociaux. Cette initiative du ministère est inacceptable car elle détourne, au profit d’un réseau privé confessionnel, des moyens jusqu’ici attribués au service public, seul réseau où l’école est gratuite et laïque et qui accueille tous les élèves sans distinction.

De 80 à 126 cités éducatives
Les cités éducatives, et leur gouvernance avec le principal de collège comme pilote, et deux représentants de la préfecture et de la collectivité locale, reposent aussi sur une contractualisation. L’inspection générale a rédigé un rapport en demi-teinte : « Le rythme et le calendrier […] des cités éducatives apparaissent […] difficilement tenables ». Le rapport critique parfois « la culture du résultat ». Les pratiques pédagogiques apparaissent en ligne de mire : « il est trop tôt pour mesurer des effets sur les résultats scolaires et sur l’évolution des pratiques pédagogiques des enseignants mais toutes les conditions sont réunies pour que de tels effets soient observables à court terme ».

TER : politique sociale ou d’austérité ?
Présentés comme le pendant rural des cités éducatives, les 24 Territoires éducatifs ruraux (TER), expérimentés depuis janvier 2021 dans les académies d’Amiens, Nancy-Metz et Normandie, sont étendus aux académies de Dijon, Limoges, Besançon, Clermont-Ferrand, Toulouse, Rennes et Bordeaux. Ces 61 TER doivent « renforcer l’ambition scolaire des élèves » et lutter contre une forme de « censure » en ce qui concerne l’orientation. Mais le ministère n’envisage pas un seul instant des créations de postes de Psy-ÉN et des ouvertures de CIO, encore moins de rendre les postes ­supprimés dans les collèges et lycées. Proposer aux élèves, comme le demande le SNES-FSU, une carte de formations diversifiées et à proximité dans tous les secteurs même les plus enclavés est possible mais il faut pour cela des moyens pour l’École publique.